les 6 petits cailloux
Bonjour la métropole et Adieu l'île qui garde un bout de notre coeur... A la Réunion s'ouvrit ce blog comme mes carnets de voyages. Ce petit coin virtuel pendant 11 années a accueilli famille et amis trop lointains en attendant qu'ils viennent nous voir. Certains ont pu venir. D'autres auraient aimé le faire... Nous voici de retour sur la toile ou ailleurs
samedi 9 mars 2024
un samedi de mars à Paris
mercredi 28 février 2024
Ateliers de Delphine à L'Espec
Micro atelier du 11 novembre 2023 :
Quelle est la partie de votre corps qui vous semble la plus fragile ?
Tout me semble finalement plus solide que je ne le crois. J’ai d’abord pensé à mes cheveux, mes paupières…mais bien sûr ce sont mes yeux, fragiles dans tous les sens du terme. Qui s’ouvrent et se referment, se fatiguent, me trahissent et me servent.
Et auxquels je tiens comme à la prunelle d’eux-mêmes.
Atelier du 20 janvier 2024, depuis Mâcon ; pris en cours de route
Glissando !
Consignes : 1/ d’après le « nounours » de Pénélope Bagieu dans son album Les Strates : raconter une histoire d’erreur consentie.
Le Riri Desserle étant le seul ami de mon grand-père à la retraite, difficile de l’oublier ! Son dernier chicot, sa gitane maïs éteinte collée juste à côté.
Comment imaginer que cet homme a été jeune, a été marié et a été aventureux, alors qu’il vient, pour sa visite dominicale, métronome de la semaine, boire la goutte et parler du passé face aux pouces de mon pépé tournant invariablement au-dessus de la toile cirée.
Le café dans les duralex.
Le canard sur un sucre.
Le contact de l’éponge sur le ciré de la toile pour pousser vers la main en coupe les miettes de brioche (achetée chez les soeurs de Joncy).
Tout cela, et la cigarette, à jamais bannie de mon propre chez-moi.
Heureusement, il y a le Riri du passé, Christophe Collomb embarqué dans sa Diane, avec sa Dulcinée. Elle est institutrice. Ils n’ont pas d’enfants. Et pas encore de RDV chez le grand-père.
A cette époque, tous les dimanches, ils faisaient le choix de se perdre, roulant au hasard, dans le seul but de l’égarement. Après un pique-nique, nulle part mais ailleurs, arrivait le moment d’ouvrir la boîte à gants pour retrouver la carte routière et leur chemin.
2/ D’après La Foudre de Pierric Bailly (P.O.L) écriture à partir d’une amorce de l’auteur, puis de mots insérés : gynéco,imprimantes, évidence, dessein
« Je n’ai même pas besoin d’un prétexte pour m’évader. Ça se fait tout seul. Je passe d’un sujet à un autre » ; l’esprit qui va à gambades. Je suis un chemin de haïjin-écho de la rivière en montagne ou brume de terre sur les Dombes. Quand les champs en friche, imprimantes magnétiques, sont imprégnés de l’automne ; évidence de la glace maintenant que le wasserfall s’est tu. Devenir stalagtite. Peindre à couverte, médailles de teintes aquatiques glissant sur le papier. Jouer des coulures puis révéler la réserve. Ce blanc de la feuille ou du coton. Enlever la gutta, la cire, la protection de nos pensées organisées. Laisser hermétique le dessein, le trajet, refermer des parenthèses sur des parenthèses et ouvrir indéfiniment nos guillemets.
3/ D’après La grande glissade de l’ours Richard T. Morris : inventer un récit pour enfant
Sur la rivière Kamogawa, l’ours Kuma aime passer le tronc moussu, herbu et champignu. Côté soleil et fleurs odorantes, il prend à pleines pattes le miel, se léchant chaque griffe, insoucieux des abeilles.
Côté forêt, il retourne dormir à l’abri des cryptomères, bercé par les grelots de mamie Akiko qui randonne et le prévient de son passage
Mais ce jour-là après le goûter, le tronc moussu, herbu et champignu est devenu tout vermoulu !
Plouf-Glou-bouh-oh-splish-zap-paf ! L’ours à la dérive quitte les deux rives.
C’est bon de couler, il sait nager.
De petits poissons lui font les yeux ronds.
Une tortue carnivore le snobe encore.
Des saumons à contre-courant jouent les garnements
Un couple de crevettes vogue en goguette.
Un serpent d’eau frôle son dos.
Les Martins pêcheurs crient : il est l’heure !
L’ours fait la planche et rejoint d’un bond le bord de l’eau.
Juste avant d’arriver aux abords de Kyoto.
Moralité : L’ours mouillé apprend à s’émerveiller.
4/ Consigne : Glisser, mais pas déraper. Contexte : Article de Libé sur un homme politique détournant l’affrication au profit de sa xénophobie. Car l’affrication n’a rien à voir avec le grand continent : rédiger un texte avec occlusives, et fricatives (lesquelles viennent se frotter aux évolutions de nos langues vivantes, françaises ou anglaises). Mettre le mot « glisser » dans une phrase d’un livre quelconque ; mon choix se porte sur Peter Pan : « He sat down on a mushroom » …
Habilement, il glissa d’un large champignon vers l’humus habité de multiples insectes, à la recherche des traces du crocodile qui lui avait croqué sa main droite, mais aussi sa plus belle pendule, prise de pirates !
Tchik-Tchak les Djinns tch’attaquent.
Tchik-Tchak Djembe et Djeu de Djambes en danse de Sioux
Enfants perdus, racailles, voyous, hors-la-loi, sauvageons, va-nu-pieds, misérables, Gavroche sans galoches
Tchik-Tchak
Tssé Tssé mouches et moutcharabieh
Tcharabia-Tchak sur les tibias des marrons à Tchilaos !
Le Neverland et l’apatride fichent la frousse. Gare aux crocodiles fatchistes.
Le Djingle de la Djungle au Journal de 20 heures ou en continu à la TChéVé
Alors Ciao
Et pour finir le rituel des Choses qui…glissent quand on mange des profiteroles en buvant du champagne :
Les bonnes résolutions
Le taux de « glissémie »
Les propos déplacés
La fermeture qu’on dézippe
Le mot exquis
La notion du temps et du déraisonnable
jeudi 25 janvier 2024
formes de la ruine
Origine du nom : “paesine” (mot pluriel italien, “paesina” au singulier, proche de “paesaggio”, paysage) ou “pierres-aux-masures” ou “pierres-paysages, appelées encore « marbres-ruines »
https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_à_image
« En Chine, on considérait comme une création le fait d’avoir trouvé une pierre de rêve. Au cours de ses déambulations dans la montagne, l’oeil de l’initié savait saisir les reflets de l’univers dans une pierre. Signant sa découverte comme oeuvre d’art, il était reconnu alors comme un artiste et la pièce prenait plus de valeur selon sa réputation. Ceux qui la contemplaient pouvaient aussi la signer et y inscrire un court poème »
(source : https://jeanpaulfavand.wordpress.com/portfolio/pierre-de-reves/ )
dimanche 14 janvier 2024
A portée d'Asie et de Bourgogne
dimanche 17 décembre 2023
Bilan d'étape 01 01 2024
« Le vrai sujet d’un voyage est nous-même tout autant que nos destinations. »
Guide anachronique de Kyoto, Allen S. WEISS
« Tout récit autobiographique est semblable à un récit de voyage : court ou long, il opère une réduction radicale de la réalité inscrite dans le souvenir et se structure autant par ce qu'il écarte que par ce qu'il intègre. » (p.147) Russel Banks, Voyages, édition Babel
Traverser la nouvelle année, ce n’est rien et c’est beaucoup. Il me semble voir au milieu de la nuit le visage de Janus qui perçoit mon passé et regarde aussi vers l’avenir, sans rien discerner de défini.
Avoir réalisé le voyage au Japon dont je rêvais depuis mes 18 ans (ce temps où je patientais pour lire une nouvelle œuvre de Kawabata, auteur traduit au compte-gouttes pour la collection abordable et raffinée du Livre de poche classique) c’est une consolation de la maladie découverte par hasard. Je ne retrouve pas les mêmes peurs à entendre le mot « cancer » cette fois comme j’ai pu les ressentir il y a 11 ans. Et pourtant c’est encore une surprise, une sérendipité contingente à ce voyage au Japon et sa dernière étape dans l’hôpital de Tokyo.
L’épée de Damoclès est au-dessus de chaque tête, mais un coup de projecteur la révèle à certains. Avoir accompli mon désir de vivre, ne serait-ce que 3 semaines au Japon, dont une hospitalisée, m’a consolée de la récidive dans une nouvelle partie du corps (obligée de regarder un croquis d’anatomie pour clarifier la géographie du foie !). C’est comme si on ne m’avait pas au moins volé un rêve.
Lorsque je me suis faufilée derrière un Jizô de Nikko (ce que je raconterai plus tard) j’ai cru pénétrer un monde tabou. Je me souviens que mon cœur était inquiet. Bien vite je suis repassée de l’autre côté, dans l’allée où leurs paupières entrouvertes se tournent vers une rivière de montagne.
J’ai trouvé sur internet que les Jizô étaient des protecteurs des voyageurs, mais aussi d’une certaine façon les esprits des limbes pour les enfants disparus trop vite ou avant de naître.
Dans le livre de Weiss*, un passage leur est consacré, qui décrit bien justement cette rive où leurs silhouettes devenaient de plus en plus abstraites, les premiers sculptés de façon à reconnaître les traits d’un modèle unique, puis leurs corps devenaient plus moussus, plus grignotés par le temps et une crue lointaine qui a fait passer leur nombre de 100 à moins de 80. Quelques pierres à la fin, comme ces totems de galets que certains aiment mettre en équilibre, poursuivaient la lignée des derniers Jizô, toujours coiffés d’un petit bonnet rouge au crochet, avec un bavoir au vermillon plus éteint.
Nadège et moi, nous étions très émues de cette découverte imprévue – nous ne cherchions qu’une balade, après le long trajet en train.
Nous sommes retournées les voir le lendemain, avec Noah, et nous avons peint, chacune, l’un de leur visage.
Ai-je été avertie par eux que quelque chose me menaçait ? Est-ce à cet endroit, avant d’en avoir conscience, que j’ai fait le premier pas vers un cheminement où il me faut à nouveau prendre toute la mesure du bonheur de vivre ?
* « Ils remplacent les bornes de délimitation et les symboles de fécondité animistes (…). Vêtus d’un bavoir de nourrisson et d’un bonnet orné de rouge -une couleur qui repousse les démons- ils peuplent les jardins des temples et des sanctuaires (…) et bien sûr le long du chemin de la philosophie. A l’origine, les Jizô était des pierres phalliques sculptées en bodhisattvas. Usées par les intempéries et les caresses bienveillantes d’innombrables passants au fil des siècles, les statues ont repris leur forme phallique originelle–parfois humanoïde–, reconnaissables en tant que Jizô uniquement à la bavette. Manifestations extrêmes du Sabi, ils sont à ce titre d’autant plus précieux. » (p.176, Guide anachronique de Kyoto)
Je termine ce premier janvier 2024 le livre de Allen S. Weiss. Le dernier chapitre contient l'exergue suivante écrite par Italo Calvino : "Quand il arrive dans une nouvelle ville, le voyageur retrouve une part de son passé dont il ne savait plus qu'il la possédait. "
dimanche 5 novembre 2023
vivre écrire marcher peindre ?
22 juillet valise presque bouclée pour aller de Fukuoka vers Kyoto
Comment rendre compte ? Cette Escale hier d’une île dans une île, celle de Nokonoshima, à 10 minutes de ferry de Fukuoka (enfin lorsqu’on a trouvé le terminal et le port !) C’est un dôme de végétation tropicale, bambous, orangers, surmonté d’un jardin incroyable où les fleurs ou les arbres sont mis en scène et en coupe réglée.
Il semblerait bien qu’un manga se passe dans ces champs de tournesols ou d’œillets d’Inde pour la saison où nous les voyons (Marigold et girasols…) Une demoiselle épouvantail devenue vivante comme Pinocchio ! (l'auteur Tatsuhiko du manga : Hotomeku kakashi )
Plage du camping
l’enfant au bout de la corde
apprend à nager
Surplombant la baie
des îles en hémisphère
cargo couleur rouille
une coiffe de fougères
sur la tête d’un rocher
Encore un dernier tour du lac quand le ciel prend des couleurs d’ocre. La terrasse en briques rouges du musée d’art moderne de Fukuoka présente des sculptures aux étoiles une citrouille à pois de Yayoi Kusama et l’équilibre -figé dans le métal- d’une danseuse classique.
scène au crépuscule
guérisseuse japonaise
ses mains magnétiques
jeudi 26 octobre 2023
où commence le voyage ?
Lyon, le 16 juillet 2023
Quand commence le voyage ? Au moment où l’on force sur le biceps pour tracter dans le bus son bagage ? Ou juste auparavant, en tournant les molettes du cadenas rejoignant les deux boucles de la valise ?
Mon voyage semblable à une gestation. Le désir, l’attente, la découverte que c’est possible, les préparatifs en douceur, pour ne pas offusquer la fortune.
Dans le bus du dimanche, commencer un livre et puis laisser le regard suivre le manège d’un frère et sa petite sœur, attentifs à la route suivie. Un voyageur attrape de justesse le bus. Il est coiffé comme un vieux sage asiatique, la calvitie à demie, et quand même une sorte de houppette en chignon*. Il sourit au chauffeur, bippe de son abonnement. Dans le rétroviseur mon attention se porte sur la marche mesurée d’une dame âgée tirant un caddie de ville. Les inconnus que je croise me disent-ils que je pars dans un pays où près de 100 000 personnes sont plus que centenaires...
Et puis la gare de la Part-Dieu. Sa nouvelle salle d’attente. Est-ce que les arbres sont vrais ? Ils touchent déjà le faux plafond : comment croîtront-ils davantage ?
*Coiffure des Nabetori, dite poignée de marmite, sobriquet pour la noblesse (Dogra Magra, de Yumeno Kyûsaku p. 249)
19 juillet
Il y a aussi la mer, avec une sorte d’îlot privé transformé par un hôtel en pseudo village italien. Quelle drôle d’idée : c’est le premier lieu que j’ai choisi de dessiner après le bain dans la mer du Japon. Le quartier de Momochi est idéal pour rêver vivre ici : les petits pavillons aux tuiles vernissées, des chemins où chaque arbre est entouré de fleurs diverses ; des ponts sur le bras de mer et, les enfants de l’école, rentrant avec leur cartable renflé, protégé par une cape de pluie.
Semi Semi-San !
les pins de Fukuoka
bruissant de cigales
Fukuoka, le 18 juillet
Il ne faut pas longtemps pour se sentir chez soi et Fukuoka est une ville dans laquelle j’ai tout de suite envie de m’installer. Notre hôtel est juste à côté d’une merveille de petit lac où se posent hérons, cormorans ou canards. Un kiosque en pagode, des ponts, une pinède en presqu’île, c’est à qui des corbeaux (karasu) ou des cigales (semi) parviendra le mieux à rompre le calme du lieu.
19 juillet
Il y a aussi la mer, avec une sorte d’île privée transformée par un hôtel en pseudo village italien. Quelle drôle d’idée : c’est le premier lieu que j’ai choisi de dessiner après le bain dans la mer du Japon. Le quartier de Momochi est idéal pour rêver vivre ici : les petits pavillons aux tuiles vernissées, des chemins où chaque arbre est entouré de fleurs diverses ; des ponts sur le bras de mer et, les enfants de l’école, rentrant avec leur cartable renflé, protégé par une cape de pluie.
Semi Semi-San !
les pins de Fukuoka
bruissant de cigales
20 juillet, Yagura hôtel de Fukuoka
Il m’aura fallu deux aurores pour découvrir la longue fenêtre à la tête de mon lit, occultée par des stores aux tons café au lait.
Des jardins denses aux arbres cirés emplissent le vide entre les immeubles chocolat. Après le rose de l’aube, une couverture nuageuse s’installe sur la ville bordée de montagnes et incurvée en bord de mer.
Nous avons pris le ferry, direction Nokonoshima. En observant la carte dessinée, tout paraît simple : un unique chemin en bord de rivage, une plage à l’Est, un jardin de rêve au Nord. Pas de voitures ; seul un bus fait la transversale pour les touristes venus saisir les couleurs de saison du jardin dominant les baies ponctuées de rochers ou d’îles plus petites encore.
Musardons au marché.
Un sachet de tomates.
Des cartes postales : soit grand-mère au milieu des cosmos, soit l’épouvantail parmi les héliotropes.
On laisse filer le bus. On s’arrête à la poste de poche. Deux employés s’occupent de nos cartes comme si elles représentaient un enjeu diplomatique : disposition codifiée, timbre floral évidemment, photographie pour immortaliser l’envoi (demandée par le préposé à la poste comme preuve de la validité de son travail et tampon en forme de calebasse).
A partir de là, ce sera une enfilade de chemins de traverses car, si l’île est petite, elle est toute en reliefs, couverte d’une épaisse végétation. Le sentier n’en est pas un : des véhicules nous poussent sur les bordures, et de multiples intersections proposent des messages exclusivement en japonais. A part la plage deux heures plus tard où je peux lire beach en katakana. Mais la plage n’a pas de sable, un enfant avec une bouée se pend à une corde pour apprendre à sauter. Des allées de cocotiers aux palmes jaunies donnent un côté exotique au camping qui rend l’accès à la mer soumis à paiement.
On n’a pas tout perdu ; s’il est hors de question de renoncer au tour de l’île pour se baigner dans une eau brune que les courants remplissent de divers éléments flottants, on nous propose gentiment de rejoindre un groupe de jeunes filles pour aller en bus au jardin merveilleux.
Ce n’est pas de refus. Nos gourdes sont à sec. Je m’abreuve de tomates… la pente bétonnée où le mini bus peine me fait fermer les yeux, de peur d’un démarrage en côte !
Ce jardin valait bien toutes les fausses routes du monde. C’est un peu comme se promener avec Mary Poppins sous un parapluie devenu ombrelle couleur d’arc-en ciel…
Reste à se glisser côte à côte sur un banc avec mon amie. Pour peindre à l’aquarelle le bleu lointain de la mer traversée par les bateaux.