samedi 29 mai 2021

Saint-Louis et le silence : ateliers d'écriture

 Atelier Saint-Louis du 21 avril 

 

Poissy, ville de naissance de Saint-Louis.

 

Consigne 1 : Sous l’armure il y a quoi ? Des lacets des silices, fil d’or ou de torture, de la douceur, 

du rêve tendre, la fragilité. (bb)

 

Un sous-vêtement, un cœur, une faille, un homme, des faiblesses, des sentiments,

 des peurs, des souvenirs, du baume (Nina)


 

Le dernier mot des autres : intrépide, un cœur pacifiste, une caisse automatique,muscles et gras. L’au-delà. Les roubignoles du Destin. Un cœur pur. Des battements.

 

Consigne 2 : Oyez ! Oyez ! Récrire en vers l’histoire de deux chevaliers de Louis IX 

piteux partis en quête du Graal

 

Levons sos verres à Karadoc !

Oyons la gloire de Perceval !

Qui ce jour rapporta le Graal

D’aucuns diraient qu’il est en toc

Or il fallut maints coup d’estoc

A nos chevaliers valeureux

 

Maints coups de canon dans un boc

Pour aller pêcher à l’anguille

Les secrets écrits en hébreu, 

Étouffés en botte comme aiguille !

Voici le vase nu comme un œuf

Qui fera l’extase de Louis IX.

 

(bb)

 

Perceval et Karadoc

Au milieu du Languedoc

Sont partis comme deux rocs

Rechercher un Graal non plastoc.

Sur le chemin ils rencontrèrent 

Un sage du nom de Pierre

Qui leur donna indice cher 

Digne des saints et de l’enfer

Leur route ils poursuivirent

Et devant un lac glacé ils virent

Deux dragons et bien les pires !

Mais bien sûr qu’ils vainquirent.

En cadeau, la populace

Pour ces deux hommes de cuirasse

Fit don d’une coupe pleine de crasse

Par politesse et respect

Pour ces âmes et corps défaits

Ils firent semblant, stupéfaits

Que cette coupe sacrée était :

Le Graal tant espéré

Ah ! Des cœurs d’or ces deux guerriers !

 

Nina



 

Consigne 3 : La Nouvelle du Perroquet d’Arnaut de Carcassés (1230)

Mots imposés pour en rédiger la suite : 

Beau parleur / Sans faute / Garni d’or / Soucieux d’amour / Pot de fer / Incendie

 

« Le meilleur chevalier qui fut jamais

Le plus distingué le plus épris

Antiphanor, le fils du roi.

Beau parleur et beaux atours,

Sera demain sans faute

À vos pieds pour votre main.

Je suis ici pour la nouvelle

Mais aussi pour jouer son préambule.

Ô dame aux yeux garnis d’or

Ces pierres dont mon amour est peu soucieux

Ô cheveux blonds et bouche vermeille,

Vous ne savez toucher mon cœur

Cette voix d’ange que tout le monde célèbre,

Tombe dans mon cœur comme dans un pot de fer.

Quand je vous mire, point d’incendie

Je ne suis pas sensible à votre charme

Et ce n’est pas en vous découpant

Que je vous montrerais ma passion !

Dame, qu’importe votre minois, 

Ce sont vos mots, 

votre esprit et votre âme 

qui ont pénétré la maille de mon cœur.

(Nina)

 

Réponse de la dame 

au perroquet venu vanter les mérites 

d’Antiphanor, le fils du roi :

 

« Beau parleur à queue d’émeraude

Pourquoi écouterai-ici

Les fleurettes d’un volatile en maraude

Je suis Dame Jolie de Mantes et de Poissy

Répète sans faute à ton prince

Tout garni d’or et de plumage

Que l’amant soucieux d’amour évince

Les entremetteurs, même de haut ramage »

 

A ces mots, l’oiseau couleur d’incendie

S’envole au-dessus du rempart.

« Dame ! Dieu me sauve ! roi maudit

Qui m’ensorcela et me fit ovipare … »

Car Antiphanor, c’était lui :

Le pot de fer était coupe en rubis.

 

Blandine.



 

Consigne 4 : La complainte du chevalier déchu

 

Christophe Tarcos, poète « Caisse »

Œuvre d’art à la cristallerie de Saint-Louis en Moselle 

(souvenirs de Zortitchak)





 

Un être de cristal

Qui ne se brise pas

En tombant

Mais qu’importe sa persévérance

Le regard d’autrui

Passe à travers lui

Sans que leur

Vision du monde ne 

Se transforme.

Un être de cristal

Qui ne se fissure pas

Au moindre cri

Tailler, limer,

Sa transparence surpasse

Tout autre, sans briller.

La lumière

Passe à travers

Comme les regards.

À quoi sert-il

Ce chevalier de glace ?

Là sans être là,

Résistant mais invisible

Ce n’est que si on le casse

Que la lumière dérive,

Que le e paysage

Se fend pour les regards.

Que se passe-t-il ?

Comment sommes-nous

Arrivés là ?

Cher être de cristal,

Tu ne le méritais pas.

(Nina)

 

 

Dans le sein de la terre, 

pauvre chevalier devenu pierre, 

ton squelette de fer s’est fait la maille 

tandis que chacune de tes côtes, 

détricotée par les lombrics et les insectes xylophages, 

sont devenues aussi frêles que les membranes 

des dernières feuilles rouges de décembre. 

 

Dans le sein de la terre 

chut et choit encore le chevalier choisi 

pour aller tailler du Maure jusqu’à

la mort, pour quel amor ?

La fin’amor, la pierre fine ou barocco

Dans le sein de la terre

Chantonne le chaton de la bague. 

Un anneau d’or serti sans un cabochon de cristal. 

Cristal de roche dans le Saint des saints,

 parfois poli parfois aigu aux angles sans reflets, 

tant que la lumière chatoie ailleurs que sous l’humus

 où gît l’humérus et le cubitus 

du preux chevalier de ma complainte.

(Blandine)

 

Consigne 5 : ça date ! ou sa date ?

 Saint-Louis, né le 25 avril 1214 

Utilisez la combinaison des chiffres de son anniversaire : 2.5.0.4.12.14

 

Louis II,

Louis V dans la lignée

quand meurt

le roi Louis IV,

Douze louis d’or dans l’escarcelle du Dauphin trop petit

Louis XIV, l’Etat, c’est Lui, le soleil aussi, et sa magnificence !

 

Utilisez la combinaison des chiffres de son anniversaire : 14.12.4.0.5.2

 

Quand vint le temps des frimas et du brumeux givre

Des capuchons blancs couvrent les divinités :

Versailles vide,

Désert

Où les eaux se taisent

Sans armure.

 

(bb)

 

En comptant les syllabes

 

2 Date

5 Le temps est limpide

0 Creux

4 Qui ne se couche

12 Qui ne s’écrit ne se perd dans le vaste lieu

14 Les non-dit plie le tissu, les Maillons de fils se tordent.

 

Tordu il se resserre pour former des images nues, de chance, de souvenirs, d’emphase

 

(Nina)

 

 

Le rituel des choses qui …

…font rire en fin d’atelier (consigne de hasard !)

Les blagues qui ne portent pas la poisse 

le riz qui crépite pour accompagner la poésie 

les chapeaux faits maison 

(bb)

 

Le sourire infini de Delphine

La coiffe qui décoiffe

Les jeux de mots électriques

Les hasards inespérés mais pas si rares

Les clins d’œil entre texte

N

 

Le rituel des choses …qu’on sort de sous l’armure dans un atelier d’écriture

Fastoche ! la philo !

La sincérité sans loup

La poésie libre

(bb)

 

Les hapax de notre vie

Les duos lettrés impensables

Les rires accompagnés de fatigue

Des éternuements muets

 

Nina


 

Atelier du 28 avril : Ecrire le silence




 

Mise en voix :

Silence, lancinant, lance, élancé, cadense, présence, ranse, carence, balance, s’élancer, 

lanciner, lentement, lent, éléphant, remplacer, plantation, planter.

(Nina)

 

Silence, cloche barrée, bourdon, cloche à la volée, vibration, souffle, tête sour l’eau, oreilles, 

Emerger, apnée, dos crawlé

(Blandine)

 

Le dernier mot des autres : hélice - « train de nuit » - aspirateur – chouquette – iceberg - strident

 

Consigne 2 : « Bruit de fond » Imaginer une scène de rue en recherchant les bruits les plus infimes

(et donc effacer les plus sonores).

 

Les craquements des feuilles sous les pas, la course peu agile d’un bambin, les pigeons qui roucoulent,

Les corbeaux qui croassent, le vent qui s’enfile dans les manteaux, les soupirs des clients dans la queue,

Une pièce tombée d’une poche, ses propres poumons essoufflés, la friction du gravier 

sous les roues d’une trottinette, un chien qui éternue

(Nina)

 

Terrasse côté bassin, le bruit presque inaudible du moustique tigre, le vent dans l’arbre-chanteur crépitant de ses graines, frou-frou des bambous, cloche si lointaine de la Vierge Noire à la Rivière des Pluies, un ou deux chiens en écho derrière la ravine, aucun bruit de moto dans l’allée, pas un pas sur le dallage, le chat qui miaule faux

en voyant repasser le moustique tigre.

(Blandine)

 

Consigne 3 : offrir un bruit à l’autre pour écrire son texte : amplifier un son pour en faire le cœur de notre histoire


« le plop-plic des gouttes de pluies sur l’auvent de la terrasse » donné par Marie :

 

4h du matin, à peine sorti du bus ; la pluie s’était arrêtée. Elle ne tombait plus des nuages 

pour tomber sur la dame au chapeau déjà trempé. Celle-ci avançait, doucement, sans montre mais à l’heure, grâce à l’habitude et aux restes brumeux qui s’écoulaient dans rigoles et gouttières.

Une pulsation aquatique des secondes humides et peu en cadence pour cette femme, ces gouttes étaient des camarades matinales. Les seules passantes qu’elle risquerait de croiser jusqu’à son arrivée à la petite école. Le porche apparaît, interrogé par un réverbère balbutiant. Il allait falloir attendre sur la marche ; la course folle de l’eau avait déréglé son horloge interne. La femme se mit sur le béton, sauvée de l’humidité du lieu et écouta le plop-plic des gouttes de pluies sur l’auvent.

(Nina)

 

« Les bulles qui éclatent dans mon Perrier citron » donné par Julianne :

 

La place est vaste, remaniée par Buren dans les années 80. Lorsque j’étais adolescente, elle était semblable à ce décor noirâtre que j’ai revu récemment dans L’horloger de Saint-Paul, à la disparition de Bertrand Tavernier. Les chevaux de bronze galopaient encore en vis-à-vis de l’hôtel de ville, leurs sabots palmés soulignant la divinité du conducteur Poséidon.

Maintenant la lourde de fontaine dessinée par Bartholdi a pris sa liberté, pivotant au centre de la place. Les naseaux chevalins transpirent leur buée en direction du palais Saint-Pierre et du musée des Beaux-Arts.

Assise à la terrasse, je cherche à peindre au plus près les muscles qui caracolent, les jambes en ruades d’eau. 

Pour peindre à l’aquarelle, une chaise et une table de bistro, cela suffit. Des grilles de protection dessinent un quadrillage comme dans les manuels de dessin, pour apprendre à organiser sa feuille, c’est pratique. 

J’ai tout : pinceau, aquarelle, carnet de voyage et… J’ai oublié l’eau. Alors je bois juste une gorgée, qui tambourine en minuscules bulles métalliques dans ma bouche. Ça vrille, elles pétillent, les bulles qui éclatent dans mon Perrier citron font un dernier feu d’artifice avant que je dévie leur ascension en troublant la boisson d’un pinceau noir de Terre de Sienne.

(Blandine)

 

 

Consigne 4 : Ch…. !  de l’art de faire résonner une consonne fricative post-alvéolaire sourde.

 

Choqué par cette échappée des sens, notre cher artichaut n’a pu chasser de chacune de ses pensées l’ombre chinoise de sa charmante amante.

(Nina)

 

Ce samedi soir à 7h, trop pressé d’aspirer sa soupe d’aspics trop chaude, Chen* s’est échaudé la bouche. Chen est chinois de Mandchourie, autrement dit Mandchou. Il lui échoit chaque fois que son chef l’en prie de se charger de cuisiner des mets de choix. Bonne chère pour le général sanguinaire et sa chérie, mais rien pour lui. 

Tandis que l’empire nippon échoue aux confins de la Chine, Chen voit déchoir le Mandchoukouo sans pouvoir piper mot, lui le cuistot dont on a arraché l’organe du charlatan et du lécheur de pots.

*personnage du roman La langue et le couteau, de KWON Jeong-hyun

(Blandine)




 

Consigne 5 : poème fondu jusqu’au silence… Café néon et autres îles - chemins grecs.

 

L’un voit les années, 

L’autre leur beauté

De telle sorte que l’étrange hasard trempant dans le bouillon d’un monde

Est un cadeau aimé par la vie.

 

L’étrange est le promontoire de l’existence.

(Nina)

 

L’huile de l’un

Les oignons de l’autre

Olives Duchamp

Bouillon du hasard

Etrange bloc des années

Maison de passe

Des êtres de joie

Existence grecque

Etrange kakavia

Je grégaire

Envier l’exil

Avoir aimé

Treize îles comme un mot.

 

(Blandine)

 

Le rituel des choses qui se partagent agréablement pour briser un silence gênant :

 

La croyance folklorique du silence en vain

Un pain qui croustille

Un verre : bulles de sauvetage

 

(Nina)

 

Dehors :

Un sourire si on n’a pas de masque

Un petit mot sur le vent ou la pluie

Une proposition d’aide pour trouver le bon arrêt de bus

 

Chez soi : 

Le torchon de vaisselle

Le dernier cookie

Le code Netflix

 

(Blandine)

 

 

 

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