samedi 18 mars 2017

Marathon de l'écriture : de Saint-Denis à Paris

lignée 3

bb : 11 mars, 16h

Puisqu'il me faut attendre deux heures à Saint-Denis que le cours de chant de ma fille se termine, et comme le conservatoire a réouvert au centre de la ville blanche, j'ai l'idée de prendre mon carnet de voyages. Cela fait plus de dix années que nous vivons dans cette île mais ces mois sont les derniers ; je voudrai redevenir un peu voyageuse, peindre des lieux d'une vie qui se boucle...
Je n'aime pas trop les architectures. Esquisser des fleurs, des arbres ou des cascades me permet de ne jamais respecter trop la symétrie ou la rigueur. Ma fantaisie rejoint plus facilement celle de la nature, sans l'égaler !
Pourtant me voilà devant la cathédrale lumineuse, bien protégée par un arbre gigantesque, sur un banc. Au fur et à mesure, je me félicite de l'emplacement. Je découvre les belles ombres portées des piliers, sur la façade. Une perspective à gauche donne à dessiner le clocher métallique que la certitude des cyclones a raisonnablement posé à l'extérieur de l'église. Il me rappelle que le temps pour peindre est mesuré.
J'aime observer ceux qui passent dans le jardin, ceux qui gravissent les marches du parvis. A droite, la grande fontaine donne de la profondeur à ma composition mais elle est coupée par le bord de la feuille. D'ailleurs, je commence à chercher du pinceau, les nuances du bronze lorsqu'un prêtre surgit, la mine encapuchonnée. En aube, trois enfants de choeur l'escortent.
Le quatuor s'approche de la large vasque. Alors une troupe d'adolescents s'échappe de l'église pour cerner la fontaine. Comme il est devenu impossible de la peindre, je m'en désintéresse et je reprends de l'ocre pour colorer les statues étranges qui débordent du bas-relief en triangle. une aile d'ange dépasse du toit du péristyle, un pied traîne plus bas que la base du tympan. Soudain mon attention revient à la fontaine qui prend feu ! A l'inverse de l'arc descendant des jets d'eau, un croissant de fumée s'élève dans l'espace, floutant le visage des statues.
Je me souviens ! Nous sommes le mercredi des Cendres ; j'entends des bribes de sermon où il est question de vieux rameaux oubliés dans les maisons... Faut-il les brûler parce que leur pouvoir protecteur s'est asséché ou du fait de leur caractère sacré ? Qui maintenant protègera ce groupe de fidèles, d'ici le dimanche des Rameaux à venir ? Un temps de Carême sans dieux Lares ni Pénates...
La foule repart comme elle est venue, par la porte de la cathédrale. Seule reste une dame qui récure une sorte de jatte et jette les cendres grasses dans l'eau de la vasque. Je vais pouvoir recommencer à peindre mais j'entends sonner la cloche de mon récit... et le gong du temps de l'écriture !



nb : 22h

Chère société de merde,

          c'est décidé, je te quitte. 
Nous avons trop de différends, pas les mêmes valeurs ni les mêmes idéaux, entre nous, ça ne pourra jamais marcher, mais voici quelques points pour éclaircir les choses :

* ta vision de la femme :
- Si je suis faite pour accoucher, ce n'est pas à moi seule de m'occuper des enfants, et même si tu fais croire que ça va évoluer, en réalité, c'est toujours le cas un peu partout
- Pourquoi les poils sont-ils mal vus ? C'est naturel, avec plein de fonctions superbes, alors pourquoi, pour un point de vue esthétique doit-on les enlever ?
- Tout métier peut être assumé par une femme ou un homme. Vive les sages-hommes, les hommes de ménage, les femmes d'affaires et les papesses !

* égalité
- Pourquoi il y a des riches et des pauvres ?
En quoi la naissance de l'enfant devrait décider de son niveau de vie. C'est comme si on avait choisi son destin à la roue. Si tout le monde avait une part de richesse, on serait le seul maître de son destin.
- Pourquoi le physique est si important pour toi ? n'est-ce pas la beauté de l'âme la plus importante ?
- Pourquoi des hommes seraient meilleurs que d'autres à cause d'une nationalité, d'un aspect physique, d'une place plus haute dans la hiérarchie ou de je ne sais quoi d'autre, merde on est tous égaux !
- différence ne veut pas dire défaut.
- Bref, je cherche quelque chose de nouveau, de plus équilibré, de meilleur
et vu comme tu es, ce ne sera jamais toi
J'espère que ta fin est proche et que de toi, on en tirera du bon, des choses à arranger.

A jamais.
Moi

note : Annonce
Recherche une utopie ou une société qui a décidé d'avancer et de croire en l'humanité. Si vous en connaissez, appelez au ...




bb : le 12 mars, 3h

Sous le pont Mirabeau il pleut un oiseau chante à la santé de Lorelei et de Lou

Sous le pont Miralaid il vente ; un pigeon dodeline et roucoule à la santé de Marie Laurencin et de Lou

Sous le pont Beauramier, il gèle ; les souris dansent à la santé de Judith et Holopherne pour qu'il tienne le "cou"

Sous le pont Miramoche, il grèle à coeur fendre ; les chats de gouttière sont partis à la prison de la Santé.

Sous le pont Beaumirage, il suinte des égoûts, la Grande Ville où les passants ne regardent plus les voiles de Salomé en corolle autour d'elle, nue.

Sous le pont Beaurivage, il bruine une houle de mer qui rapporte sur la grève des bois flottés de tous les océans, des poissons retournés, des baleines échouées et des dérives en plastique.

- Vienne l'aurore, sonne l'heure
Les mots s'en vont, les hommes meurent

-Sonne la cloche de bois, vienne le temps
des sans-dents, des sans-abris, des sans-famille
des sans-domicile au beau fixe

Sous le pont Mirabeau
Coule le soleil en automne
les Mal-aimés, lentement, à son regard
s'empoisonnent


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